Siméon-Denis Poisson, mathématicien, est né à Pithivier, aujourd'hui chef-lieu d'arrondissement du département du Loiret, le 4 juin 1781. Il est mort le 25 avril 1840, à Paris.
Agé de dix-sept ans, il fut reçu le premier de sa promotion, à la fin de 1798, à l'École polytechnique, pour laquelle il s'était préparé presque seul, sans le secours de professeurs nombreux. Son père, comme président de district, recevait régulièrement un exemplaire du journal périodique de ce grand établissement naissant. Amateur passionné de lecture, l'enfant accaparait la brochure, y trouvait l'énoncé des questions qu'il résolvait assidûment. Cet exercice développa les talents mathématiques que la nature avait déposés en garde dans la vaste tête de celui qui était destiné à devenir une des illustrations scientifiques de la France. A sa sortie de l'École, Poisson fut chaudement recommandé par Lagrange, et, peu de temps après, on lui confia les fonctions de répétiteur, au commencement de 1800. En 1802, il devint professeur suppléant, et professeur titulaire en 1806. En 1808, il fut élu à une place d'astronome au Bureau des longitudes, et, en 1809, il fut chargé d'enseigner la mécanique rationnelle à la Faculté des Sciences de Paris. Successivement, en 1812, en 1815, en 1816, en 1820, en 1827, il fut nommé examinateur de sortie à l'École de Siant-Cyr, à l'École polytechnique, géomètre du Bureau des longitudes, conseillé de l'Université. Le 23 mars 1812, il était élu membre de l'Académie des Sciences.
Ces divers emplois, remplus simultanément, procurèrent à Poisson une grande aisance et lui laissèrent tous les loisirs suffisants pour se consacrer aux recherches mathématiques, physiques et astronomiques. C'est alors qu'il produisit ses mémoires sur l'élimination, les équations différentielles, le calcul des variations, la courbure des surfaces, le calcul des probabilités, et puis ses recherches sur la physique générale, la physique terrestre, l'électricité, le magnétisme, la capillarité, les lois de l'équilibre des surfaces élastiques, l'invariabilité du jour sidéral, les mouvement de la lune autour de la terre, etc. Poisson ne fut pas seulement un profond géomètre ; il fut un professeur extrêmement remarquable. il avait l'habitude de dire : "La vie n'est bonne qu'à deux choses : à faire des mathématiques et à les professer."
Poisson a rassemblé des souvenirs touchants sur son père et sa mère. Il ne manquait jamais d'envoyer au premier un exemplaire de tous les mémoires qu'il publiait. L'ancien soldat, quoique complètement étranger aux mathématiques, en faisait sa lecture quotidienne. L'introduction, qui présentait l'historique de la question, finissait à la longue par disparaître sous le frottement continuel des doigts tournant et retournant les feuillets. Mais la partie centrale des mémoires où se trouvaient des signes de différentiation et d'intégration, était moins détériorée ; là même on voyait, par des traces évidentes, que le père était resté fréquemment en contemplation devant l'œuvre du fils. Quant à sa mère, Poisson lui écrivait avec une grande régularité, surtout après la mort de son père.
Rappelons que c'est à peine admis à l'Ecole polytechnique, que Poisson trouva une démonstration simple, concise, élégante, d'un important théorème d'algèbre, relatif à l'élimination, sur lequel l'analyse n'avait encore produit qu'un volume énorme, et presque illisible. Laplace voulut connaître un géomètre qui débutait si prématurément. Quelques minutes d'entretien accrurent encore la haute opinion que la lecture du Mémoire sur l'élimination lui avait déjà inspirée. Ses espérances, l'auteur de la Mécanique céleste les caractérisa sur-le-champ d'une manière à la fois énergique et familière, par ces vers, passés proverbes de Jean de La Fontaine :
Petit poisson deviendra grand,
Pourvu que Dieu lui prête vie.
On a vu ce qu'il advint du futur grand géomètre. Ce travail fut le premier et brillant anneau de la longue série de Mémoires, au nombre de 351, qui ont été catalogués par Poisson lui-même et qui lui ont donné un rang si éminent parmi les savant du XIXe siècle. J.-A. Barral a reproduit cette liste dans le tome dixième des oeuvres de François Arago, à la suite de l'éloge de Poisson.
La ville de Pithiviers a élevé une statue à Poisson, due à Deligand et fondue par Charnot, le 15 juin 1851, sur une de ses places publiques. C'est elle que le dessin de notre livre réimprime. Une des rues de la ville de Paris , sur la rive droite de la Seine, porte son nom.
Georges Barral
Le Panthéon scientifique de la tour Eiffel
Nouvelle librairie parisienne, Albert Savine éditeur, Paris, 1892.
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