Eugène Belgrand, ingénieur, est né à Champgny-sur-Ource (Côte-d’Or), le 23 avril 1810. Il est mort à Paris le 7 mars 1878. Il entra à l’École polytechnique à l’âge de seize ans pour en sortir comme élève des ponts et chaussées en 1828.
Il fut attaché de bonne heure au service du département de la Seine et chargé de la direction des eaux et égouts de la ville de Paris. C’est à lui que la capitale doit son admirable système de cloaca maxima se déversant dans le grand égout collecteur d’Asnières, et présentant un ensemble de travaux gigantesques admirablement conçus et exécutés. C’est lui encore qui a dirigé les travaux de dérivation de la Vanne pour doter Paris d’eau potable, et qui a présidé à la construction de l’immense bassin de Montsouris.
Au moment où la mort la saisi, cet infatigable travailleur préparait l’achèvement du réseau des égouts. Cette opération nécessitait une dépense complémentaire de 40 millions. Pour faciliter cette entreprise, son but était de proposer la transformation de la vidange, en supprimant les fosses fixes ou mobiles ainsi que la pestidentielle voirie de Bondy, pour tout jeter directement à l’égout. Belgrand voulait aussi imposer à tous les propriétaires l’abonnement aux eaux de la ville.
C’est aussi à Eugène Belgrand que Paris doit son système de distribution d’eau pure à tous les étages des maisons. En avril 1854, M. Haussmann, préfet de la Seine, le chargea de faire une étude des sources qui pouvaient être dérivées vers la capitale. Suivant le programme tracé, l’eau devait être limpide et fraîche, et elle devait arriver dans les réservoirs à une hauteur de 53 mètres au desssus du niveau supérieur du fleuve, et fournir un volume de 86, 000 mètres cubes par 24 heures. Belgrand se mit à l’œuvre en basant son système sur un principe dont l’étude à démontré l’exactitude. Il admit que, dans toute l’étendue d’une même formation géologique homogène, la composition chimique des matières en dissolution ne doit, pour ainsi dire, pas varier. Selon lui, dans toute l’étendue de la craie blanche, en Champagne, les eaux de source devaient être de même qualité ; il devait en être de même dans les terrains gypsifères de la Brie, et ainsi de suite. Il suffisait donc d’exécuter l’analyse d’un certain nombre échantillons d’eau provenant de chaque formation géologique, pour connaître la composition de toutes les sources d’eau qui s’y trouvaient. Belgrand a fixé, de cette façon, la classification des rivières de la Seine, sous le rapport de leur composition chimique, et il en a divisé le réseau en huit régions, qui englobent l’Ile de France, la Brie, la Champagne, la Normandie. Toutes ces contrées seront mises en exploitation au fur et à mesure qu’il sera nécessaire d’augmenter l’approvisionnement d’eau potable de Paris.
Eugène Belgrand a publié des ouvrages qui attestent autant de science que d’érudition. Il faut citer en première ligne La Seine et le bassin parisien aux âges anté-historiques (1869) ; Les travaux souterrains de Paris, le régime de la pluie, des sources, des eaux courantes (1873 et 1875) ; L’aqueduc romain de Sens ; Les eaux anciennes de Paris (1877). Cette dernière publication comprend l’historique et l’étude des aqueducs romains de Chaillot et d’Arcueil, et se continue jusqu’à la construction des pompes et des machines en Seine du XVIIIe siècle.
Eugène Belgrand appartenait à l’Académie des sciences, à titre de membre libre. Son éloge a été prononcé M. Joseph Bertrand, l’un de deux secrétaires perpétuels, dans la séance publique annuelle du 24 décembre 1879. L’année précédente, M. Mille, ingénieur général des ponts et chaussées, en retraite, avait publié, dans la Revue scientifique, une étude sur ses travaux.
Une des rues de Paris, sur la rive droite de la Seine, porte son nom. Le portrait qui le représente a été fait d’après une photographie prise en 1872.
Georges Barral
Le Panthéon scientifique de la tour Eiffel
Nouvelle librairie parisienne, Albert Savine éditeur, Paris, 1892.
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