29. Les mathématiques peuvent-elles servir pour la theologie et pour la physique ? |
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Question XXIX.
Les mathematiques peuvent-elles servir pour la Theologie et pour la Physique? |
Ce qu'il falloit trouver...
Plusieurs cröyent que les Mathematiciens ne servent de rien pour les affaires de la foy, ny pour la Physique, & qu'elles ne sont autres chose que des imaginations abstractes, qui sont entierement inutiles pour le commerce des hommes : Mais s'ils sçavoient la grande utilité que l'on en peut tirer pour l'une & l'autre de ces facultez, à sçauoir pour la Theologie & pour la Philosophie, & pour le contentement de l'esprit, ils changeroient bientost d'avis. Les livres que Clavius & les autres ont escrit du Calendrier Romain, & de sa réformation, & ceux que le Reverend Pere Petau a fait de la Chronologie, & que l'on compose tous les jours pour expliquer plusieurs passages de l'Escriture, montrent assez evidemment l'utilité que l'on tire des Mathematiques pour la Theologie. Quant à la Philosophie, outre qu'elles font l'une de ses parties, les propositions qui enseignent que les plans, ou les surfaces sont en raison doublée des costez, comme les solides sont en raiſon doublée des surfaces, servent pour tirer une grande quantité de raisons & de conclusions des principes de la Physique, dont je mets icy quelques exemples. Les petits animaux qui tombent de haut en bas se blessent moins que les plus grands, parce que la raison de leur solidité à leur superficie est moindre, & consequemment ils tombent moins viste, & sont plus soulagez par l'air : de là vient que l'on jette beaucoup plus loin les corps pesans que les legers ; que les grands voiles font aller plus viste les vaisseaux de mer ; que les enfans digerent plus aisement que ceux qui sont plus âgez ; que le colosse resista si longtemps aux vents : que la fumée, & les vapeurs s'eſlevent si promptement : que quand on remue un pannier, ou un autre vaze plein de grains, de legumes, ou d'autre fruict, les plus gros viennent les premiers du fond du vase sur la surface, &c. de sorte que si l'on prend la peine de deduire tout ce qui se fait dans la nature par la force de ce principe des Mathematiques, on trouvera qu'il est fort universel, & qu'il sert pour decider une grande multitude de difficultez qui appartiennent à la Physique : attendu qu'il est le fondement de la raison doublée , & de la triplée, qui sert de conduite à l'esprit pour de terminer le progrez de toutes les spheres d'activité de chaque agent naturel le laisse les trois sortes d'angles (dont le droict represente la vertu ; l'obtus, le vice qui luy est opposé par excez, & l'aigu qui represente le vice qui est opposé au precedent, dont l'exemple se peut prendre dans la liberalité qui est combatue par la prodigalité, & par l'avarice) & mille autres choses que l'on peut tirer des Mathematiques pour expliquer la Theologie , comme l'on peut voir dans le Cardinal de Cusa.
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